1948

Bulletin du SYNDICAT DEMOCRATIQUE RENAULT – Numéro 17


BULLETIN du S.D.R. n° 17

Barta

26 octobre 1948


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LES SCISSIONNISTES

Nous en sommes là : les mineurs en grève sont attaqués par des forces massives de répression, le sang ouvrier a coulé et aucun autre mouvement ne vient desserrer l'étreinte qui est en train d'étouffer les travailleurs des mines.

Dans notre usine, l'appel du 25 Octobre des responsables cégétistes, pour un quart d'heure de grève de solidarité, n'a pratiquement été suivi par personne, en dehors d'une minorité de cégétistes "fidèles".

Les ouvriers seraient-ils indifférents au sort des mineurs ? L'instinct prolétarien de solidarité qui constitue l'atout principal de la classe ouvrière pour améliorer ses conditions de vie serait-il émoussé ? Les travailleurs de chez Renault, qui, depuis Mai 47, ont été à l'avant-garde des luttes sont-ils devenus incapables de montrer leurs forces ?

Nous ne le pensons pas, car, pour le penser, il faudrait admettre que les travailleurs de chez Renault ont perdu tout sens critique jusqu'à ne pas voir ce qui est l'évidence même, à savoir que le sort qui sera fait aux mineurs sera fait à toute la classe ouvrière, y compris aux ouvriers de chez Renault. Le renforcement de l'exploitation, que nous fait subir actuellement M. Lefaucheux, n'est qu'un avant-goût de ce qui se prépare.

Les raisons de cette "passivité", ce n'est pas dans les coeurs des ouvriers qu'il faut les chercher, mais dans l'attitude des organisations syndicales officielles, en particulier de la C.G.T. L'expérience de la grève à la force des poings du 14 Septembre a révélé l'étendue du danger que constituent les énergumènes du P.C.F. pour un mouvement gréviste sain des ouvriers ; et ce n'est pas l'attitude des responsables de F.O. et de la C.F.T.C. qui peut contrecarrer et neutraliser leurs agissements. Car ces messieurs qui se plaignent des agissements de la C.G.T., au lieu de présenter un programme revendicatif et des moyens d'action véritablement prolétariens, ne se manifestent point autrement que comme appendice de M. J. Moch.

La situation est très grave : les travailleurs ont lutté dans des mouvements toujours renaissants et qui leur ont coûté des sacrifices innombrables. Mais ils n'arrivent pas à recueillir le fruit de leurs luttes, parce que divisés par les agissements des représentants des grandes centrales syndicales.

C'est aujourd'hui l'évidence même que ces organisations sont les principaux agents scissionnistes de la lutte d'ensemble des ouvriers. Cette évidence prouve aussi que la seule solution, c'est la voie qu'ont prise les travailleurs groupés dans le Comité de grève du mois de Mai 47 ; créer un syndicat de base, le S.D.R., était la seule voie juste.

Seulement, bien qu'au mois de Mai la majorité des travailleurs de chez Renault ait suivi le Comité de grève, et que depuis, selon les circonstances, des milliers ou des centaines aient répondu à ses appels, la presque totalité des travailleurs, à qui les années d'occupation et la C.G.T. bureaucratisée de Jouhaux et de Frachon ont fait oublier les véritables traditions du mouvement ouvrier, se sont imaginés que le nouveau syndicat allait exister aussi sans leur participation active, par le truchement d'une carte et d'un timbre plus ou moins payé à jour. C'est pourquoi nous entendons souvent dire les travailleurs : "Le S.D.R. est honnête, mais il est trop petit", comme si le S.D.R. avait pu être autre chose que ce que les ouvriers en ont fait.

Nous sommes convaincus que nous arriverons à nous regrouper ensemble dans une seule organisation de base. Car si nous en étions incapables, nous devrions alors nous résigner à la faim, au froid et à la guerre.

Pierre Bois
Département 6


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