1949 |
L'émancipation des travailleurs sera l'œuvre des travailleurs eux-mêmes (Marx) |
BULLETIN du S.D.R. n° 22
4 janvier 1949
Le large écho trouvé par notre action "pour les 10.000 f" parmi les travailleurs de la Régie a obligé les autres organisations syndicales, C.G.T., C.F.T.C. et F.O. à la reprendre à leur compte. Elles ont décidé d'aller ensemble à la Direction. Mais, comme d'habitude, en feignant d'ignorer le travail déjà effectué par le S.D.R. et son rôle dans une telle lutte. Cependant notre syndicat s'était adressé, dès le 25 Décembre, à la C.E. de ces organisations en leur proposant "une prise de contact immédiate entre toutes les organisations syndicales de l'usine, y compris F.O. et la C.G.C., pour se concerter, en liaison constante avec les ouvriers, sur les moyens à utiliser pour faire aboutir rapidement cette juste revendication".
Mais bien que de nombreux ouvriers soit C.G.T., soit F.O., approuvent notre action et aient signé nos pétitions, les petits bonzes de la Régie, au lieu de suivre la volonté d'unité d'action des travailleurs de base, ont exécuté docilement les consignes de leur Frachon et Jouhaux : pas d'unité d'action avec le S.D.R. Ces bureaucrates craignent, en effet, tout mouvement authentique et indépendant de la base ; ils craignent pour leurs postes et cotisations. Seule la C.F.T.C. nous a répondu affirmativement, mais attendons les actes !
L'attitude des bonzes de la C.G.T. et F.O. prouve, une fois de plus, qu'ils n'ont été d'accord, en paroles, avec la revendication du S.D.R. que pour mieux la saboter dans les faits. M. Lefaucheux ne s'y est pas trompé qui les a envoyés promener quand ils ont effectué leur soi-disant démarche (d'où était absente la principale force qui soutient la lutte revendicative, le S.D.R.).
Mais, malgré les bonzes, l'unité d'action se fera ! Les travailleurs veulent obtenir leur juste revendication. Ce n'est possible que par l'union ; donc l'union se fera ! Puisque les bonzes ne veulent pas qu'elle se fasse avec eux, les travailleurs la feront contre eux !
Une fois de plus, M. Lefaucheux vient de préciser ses objectifs. Son plan ? Doubler la production par rapport à celle d'avant-guerre, alors que le pouvoir d'achat des ouvriers est à peu près à un tiers de celui de 1938.
M. Lefaucheux ne mâche pas ses mots : "Il ne faut pas se soucier de la paye, ce qui compte, c'est la production". Voilà, en guise de "prime de persévérance", son cadeau de Nouvel An aux ouvriers !
Cependant, en même temps, il déclare avoir réalisé 2000 millions de bénéfices (100.000 f par tête d'ouvrier) et il tait, naturellement, les dizaines de milliards investis et les fortunes payées aux gros et moyens parasites qu'engraisse la Régie.
Augmenter la production pour qu'en fin de compte notre sort s'améliore ! M. Lefaucheux nous chante là une chanson que ses propres auteurs, les bonzes cégétistes qu'il y a trois ans, Frachon et Jouhaux, ont dû renier depuis, en présence des catastrophes qui en ont résulté pour la classe ouvrière. Car nous sommes toujours en régime capitaliste où la production n'appartient pas à ceux qui produisent mais à ceux qui possèdent, où le producteur n'est qu'un salarié dont le salaire n'est pas en fonction du travail qu'il fait mais en fonction du rapport de forces entre capitalistes et ouvriers.
L'objectif de M. Lefaucheux reste celui du "Seigneur de Billancourt", feu Renault : exploiter sauvagement les ouvriers. Le nôtre ne doit pas non plus changer : un salaire suffisant et des loisirs. Nous sommes des hommes et non des serfs !
Pierre Bois
Il a fallu que nous consultions le bulletin de M. Lefaucheux pour apprendre, deux mois après, les revendications qui ont été déposées. Dans aucune assemblée générale ces revendications ne nous ont été proposées, puisque, comme nous l'avions déjà signalé, aucune assemblée n'a eu lieu depuis les élections.
On s'étonne ensuite que nous n'obtenions rien. Comment nos revendications pourraient-elles aboutir, quand nous ne connaissons même pas celles qui ont été déposées ? Ce n'est pas le Saint Esprit qui le fera, ni du reste les délégués qui répètent tout le temps que pour obtenir satisfaction, il faut que les ouvriers fassent quelque chose... alors qu'ils ne sont même jamais consultés. Ainsi, au sujet des 10.000 frs., on répond aux ouvriers qui s'y intéressent que c'est de la "blague", alors qu'à moi seule j'ai recueilli environ 250 signatures sur la pétition !
Il est inadmissible que les délégués ne revendiquent que ce que leurs organisations décident, sans tenir compte de notre volonté. Une grande confusion règne, en ce moment, au sujet de la prime et des salaires. Nous exigeons qu'une assemblée générale des ouvriers du département soit convoquée afin que nous puissions voir quels moyens utiliser pour faire aboutir nos revendications, y compris les 10.000f (avec la hausse des prix, du loyer, nous en aurons besoin).
Andrée Hardy