1848-49

Marx et Engels journalistes au coeur de la révolution...

Une publication effectuée en collaboration avec la bibliothèque de sciences sociales de l'Université de Québec.


La Nouvelle Gazette Rhénane

F. Engels

Le tzar et ses sous-kniaz

n°293, 9 mai 1849


Cologne, le 8 mai.

On dit que l'ambassadeur de France à Berlin a protesté contre la marche des Prussiens en direction de la Saxe .

Le gouvernement français a donc enfin pris conscience que la contre-révolution de l'Europe orientale le menace lui aussi, que le but dernier et suprême de la nouvelle Sainte-Alliance n'est autre que de conquérir, et cette fois peut-être bien - de partager la France ?

Nous savons positivement que le traité conclu par le tzar orthodoxe et ses deux sous-kniaz d'Olmutz et de Potsdam s'est fixé, pour ultime but de l'Alliance, de conquérir la France, d'anéantir la république et de faire monter sur le trône de France et de Navarre le « roi légitime », le « fils de Saint Louis », cet imbécile d'Henri de Bordeaux [1].

On peut à peine douter qu'Odilon Barrot ne soit pas dans le complot.

Soldats prussiens de la territoriale, voilà ce que l'on attend de vous ! On vous arrache à vos foyers, à votre femme et à vos enfants pour lutter d'abord contre vos frères d'Allemagne et de Prusse et aider à supprimer jusqu'au petit reste de la liberté que vous avez conquise l'année dernière - pour lutter ensuite contre les Hongrois qui viennent au secours de votre liberté menacée, et quand vous aurez terminé cette œuvre à la satisfaction de vos « kniaz » et de votre seigneur et maître souverain, du tzar Nicolas, ensuite on vous fera franchir le Rhin et on vous mènera contre le peuple dont les soulèvements héroïques de 1789-1794, 1830 et 1848 vous ont procuré toutes les libertés dont vous jouissez.

L'an dernier, en combattant sur les barricades et, masse populaire, en exerçant votre pression menaçante, vous avez conquis quelque liberté, est-ce pour aider maintenant comme soldats de la territoriale, à l'écraser de nouveau et finalement, au service de votre seigneur souverain, le tzar russe, détruire les deux remparts de la liberté que sont la Hongrie et la France !


Notes

[1] Le comte de Chambord, appelé aussi Henri de Bordeaux, naquit en 1820 à Paris et mourut en 1883 à Frohsdorf en Autriche. Il était l'unique héritier de la branche aînée des Bourbons. Il vint au monde sept mois après la mort de son père, le duc de Berry. Il partit pour l'exil en 1830 et, après la mort de Charles X en 1836, il devint le chef du parti légitimiste.


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