"(...) le prolétariat mondial, le prolétariat de chaque pays, abordent une étape décisive de leur histoire : il leur faut reconstruire entièrement leur propre mouvement. La crise du stalinisme (...) s'ampliie au moment où le mode de production capitaliste pourrissant s'avance vers des convulsions mortelles, qui riquent d'entrainer l'humanité toute entière dans la barbarie. (...) De cette crise des appareils naissent les possibilités de reconstruire la IV° Internationale." |
Défense du trotskysme (2)
Pour la reconstruction de la IV° Internationale
Document adopté par l'Organisation trotskyste (pour la reconstruction de la IV° Internationale)
« La Vérité » n°545 - oct.1969.
La liaison des prolétariats d’Europe orientale entre eux et avec le prolétariat russe s'affirme objectivement, elle a ses racines dans l’unité des problèmes qui les confrontent, leur maturation est croissante. Mais elle existe également entre ces prolétariats et ceux d'Europe occidentale. L'exemple le plus direct est fourni par l'Allemagne, divisée en deux systèmes sociaux l’un et l'autre forcément instables et également inviables. L'unité de I'Allemagne est à la longue inéluctable. Elle répond, non seulement à l'unité de langue et de culture, mais aux exigences économiques. Elle dépend de l'unité de l'Europe tout autant que l'unité de l'Europe découlerait de l'unité de l'Allemagne. La précipitation des crises conjointes, et qui s’alimentent l'une l'autre, de l'impérialisme et de la bureaucratie du Kremlin débloquerait la lutte des classes en Allemagne, entravée depuis la fin de la guerre par la division en deux du prolétariat allemand.
La chute de De Gaulle et la crise sociale et politique qui ne cesse d'opérer en Tchécoslovaquie annoncent une accentuation sans précédent de la lutte des classes en Europe. L'effet politique sur tous les prolétariats européens d'une intensification de la lutte des classe dans un quelconque des pays comme la France, l'Allemagne, l'Italie, l'Angleterre, la Tchécoslovaquie, la Pologne, la Hongrie et naturellement l'U.R.S.S. sera fulgurant : la crise de l'impérialisme et celle de la bureaucratie du Kremlin en seront aussitôt portées à leur point de rupture ; la nécessité de l'unification de l’Europe sur la base d'un seul système social et économique se manifestera brutalement. L'interdépendance de la lutte contre l'impérialisme et la bureaucratie saisira des dizaines de millions de prolétaires ; la pressante nécessité des Etats-Unis socialistes d'Europe, comme seul cadre permettant aux prolétariats d'Europe et d'U.R.S.S. de résoudre leurs problèmes deviendra évidente.
Il n'est pas moins évident qu’un tel développement de la lutte des classes en Europe aura une influence décisive aux Etats-Unis, au Japon et sur tous les exploités d'Asie, d’Afrique, d'Amérique latine. Le contrôle exercé sur le prolétariat européen par les appareils réformistes et staliniens a eu de très lourdes conséquences sur le développement de la lutte des classes aux Etats-Unis, au Japon et dans les pays économiquement arriérés. Il a contribué à bloquer la maturation politique du prolétariat des Etats-Unis. Il a limité les cadres des combats et l'organisation de classe du prolétariat japonais. Il a favorisé le rôle des directions petites-bourgeoises dans les pays économiquement arriérés, leur contrôle sur les masses ouvrières et paysannes.
Le nouveau cours de la lutte des classes en Europe ouvrira à court terme de nouvelles perspectives aux prolétariats du Japon et des Etats‑Unis, en même temps qu'il obligera les impérialismes américains et japonais à s'orienter vers des modes de domination politique de type fasciste, afin de tenter de maîtriser la crise sociale, économique et politique inéluctable, donc de briser toute organisation du prolétariat de ces pays. Dans les pays économiquement arriérés. La lutte est incessante. Les nouvelles explosions de classes qui viennent de se produire en Argentine, en Uruguay, etc., prouvent que, malgré les dictatures militaires, les bourgeoisies de ces pays ne contrôlent, au compte de l'impérialisme, les processus de classe qu'en surface. En Asie, l'Inde et le Pakistan ne sont pas plus stables. Au Vietnam, rien n’est réglé. D’une crise révolutionnaires en Europe, la lutte des ouvriers et paysans vietnamiens tirerait les conditions de la victoire sur l'impérialisme américain. Malgré le coup d'arrêt donné à la « révolution culturelle » en Chine, malgré la reconstruction de l’appareil bureaucratique, durement éprouvé par ses déchirements internes, et dont le IX° congrès du P.C.C. a été un moment. Les mêmes problèmes demeurent. La révolution chinoise ne peut être cantonnée à la Chine. Elle reste un facteur de mobilisation des masses ouvrières et paysannes d'Asie. Les rapports sociaux qu'elle a inspirés ne peuvent jouer à plein leur rôle dans le développement des forces productives que si la révolution politique balaie la bureaucratie chinoise et que s'ils sont étendus, en particulier, aux pays hautement industrialisés d'Asie (Japon). Ils ne peuvent être pleinement efficaces qu’autant que la coopération économique avec l'U.R.S.S. est reprise sur de nouvelles bases, c'est-à-dire à partir du renversement de la bureaucratie du Kremlin par le prolétariat de l'U.R.S.S accomplissant la révolution politique et que si l'ensemble des pays économiquement développés participent au développement économique de la Chine, c'est‑à‑dire si la révolution sociale s'y accomplit. La pression conjointe de l'impérialisme de la bureaucratie du Kremlin sur la bureaucratie chinoise aboutira obligatoirement à de nouvelles crises et scissions en son sein. La résistance de la bureaucratie chinoise à cette pression est un élément de dislocation de la bureaucratie du Kremlin et de son appareil international. En U.R.S.S. et dans les pays de l’Europe de l'Est, elle a un écho considérable sur les couches bureaucratiques de ces pays qu'effraie la politique qui tend à transformer les bureaucraties en simples agences de l'impérialisme et de la restauration capitaliste. Mais, inversement, la crise de la bureaucratie du Kremlin, en se précipitant, alimentera celle de la bureaucratie chinoise, qui est , elle aussi, prise au piège de l’histoire : la « coexistence pacifique » à la chinoise n'étant pas plus réalisable que la « coexistence pacifique » à la mode du Kremlin.
L'unité de la lutte des classes mondiale s'affirme avec la crise révolutionnaire qui s'annonce en Europe et qui concerne aussi bien les pays de l'Europe occidentale que ceux d'Europe orientale et l'U.R.S.S elle‑même. En Europe fusionnent la révolution sociale et la révolution politique. Les rapports entre les classes y sont tels que s'y concentrent toutes les contradictions et faiblesses de l’impérialisme et de la bureaucratie du Kremlin, tandis que la classe ouvrière occupe des positions de classe très puissantes et concentre l'expérience de plus d’un siècle de lutte. Sans modifier radicalement les rapports entre les classes en Europe dans la toute prochaine période, l'impérialisme mondial et la bureaucratie du Kremlin n'échapperont pas à une crise qui les disloquera. La grève générale de mai‑juin 1968, la montée de la révolution politique en Tchécoslovaquie, au printemps et en été 1968, la chute de De Gaulle, sont les premières explosions d'une nouvelle crise révolutionnaire qui mûrit en Europe et se répercutera dans le monde entier.
Une nouvelle période de grands bouleversements est ouverte. Une nouvelle crise révolutionnaire mondiale s'annonce. Compte tenu de la puissance du prolétariat dans les pays économiquement développés, des positions qu'il occupe, de la faiblesse, de l'irrémédiable décadence des impérialismes européens, de la nécessité pour l'impérialisme américain, de faire valoir ses intérêts spécifiques, de la crise de la bureaucratie du Kremlin, des bureaucraties satellites, de la crise de l'appareil international du stalinisme, de l’échec de la stratégie mondiale développée ces dernières années par l'impérialisme américain, de l'échec de la politique de domestication à froid des prolétariats d'Europe occidentale par les bourgeoisies décadentes d'Europe, de l'échec de la politique de la bureaucratie du Kremlin et des bureaucraties satellites, l'impérialisme ne peut échapper à une gigantesque crise sociale, économique et politique, la bureaucratie du Kremlin ne peut éviter d'être déchirée en ses composantes. Le monde entier s'achemine manifestement vers un chaos sans précédent. Mais ce chaos ne sera pas arbitraire. Il sera ordonné par les lois de la lutte des classes. Si le prolétariat, s'appuyant sur les positions déjà conquises, les dépasse, s'il parvient à se forger les instruments de la lutte et de la conquête du pouvoir politique, s'il unifie ses combats a l'échelle internationale, le nouvel ordre qui résultera sera le socialisme.
Les instruments nécessaires , ce sont les partis révolutionnaires, l’Internationale.
Sinon le monde roulera vers la barbarie.