1946 |
Tract signé : UNION COMMUNISTE (IVème Internationale), ronéoté, 2 pages |
A BAS LE
PLÉBISCITE !
Pour un 1er Mai de lutte
26 avril 1946
A BAS LE
PLÉBISCITE !
Pour un 1er Mai de lutte
(26 avril 1946)
TRAVAILLEURS,
On vous appelle, le 5 mai, à répondre par OUI ou par NON à la nouvelle Constitution.
Aux élections du 21 octobre, le Parti Communiste Français s'était élevé contre le référendum de De Gaulle parce que celui-ci en avait fait un plébiscite: c'est-à-dire que par le chantage du pire, en menaçant le pays, pour le cas où il ne voterait pas « oui-oui », du « saut dans l'inconnu », de « l'instabilité politique », de la « politique de l'aventure », il posait en quelque sorte le revolver sur la tempe de l'électeur pour l'obliger à voter en faveur du chef du gouvernement.
Aujourd'hui, PCF et PS recourent à leur tour au référendum plébiscitaire, en menaçant l'électeur, pour le cas où il ne voterait pas « oui », du danger du « provisoire » et de « l'instabilité politique », de la « course au désordre et à l'anarchie », de la « politique de l'aventure ».
Si la Constitution était réellement démocratique et conçue pour la défense des intérêts des millions de travailleurs de la ville et des champs, ses auteurs auraient-ils besoin de recourir au chantage du pire ?
C'est parce qu'elle ne l'est pas que ses partisans intéressés se hâtent d'ajouter que « ce qui importe avant tout, ce n'est pas ce qui se trouve dans la Constitution, mais de choisir entre nous et la réaction, de voter « oui » pour nous, contre la réaction qui vote « non » !
Mais il ne suffit pas que PCF et PS se baptisent eux-mêmes et la Constitution comme démocratiques, pour que le peuple les reconnaisse pour tels.
Ce n'est pas battre la réaction, mais la renforcer que de faire approuver par le peuple une Constitution qui consacre l'indépendance de l'appareil gouvernemental vis-à-vis de la représentation parlementaire.
Ce n'est pas battre la réaction, mais la renforcer, que de perpétuer le système réactionnaire de la séparation des pouvoirs législatif et exécutif, de la nomination et de l'inamovibilité des hauts fonctionnaires de la police, de la magistrature, de l'administration, c'est-à-dire LE SYSTÈME DU POUVOIR SÉPARÉ DU PEUPLE.
C'est ce système qui, sous un gouvernement à majorité « socialiste-communiste » , aboutit à la libération (le Bergery et à l'arrestation de Hénaff en vertu d'un décret de Vichy !
Ce n'est pas battre la réaction que de garantir la propriété capitaliste, c'est-à-dire la mainmise d'une minorité d'exploiteurs sur les richesses de la nation et l'obligation pour les travailleurs de vendre leur force et leur intelligence comme une marchandise, aux propriétaires des usines et des machines.
Quelle démocratie est possible dans un régime où le capitaliste peut fermer l'usine comme sa tabatière, et jeter sur le pavé les ouvriers ?
Quelle démocratie est possible dans un régime où les longues heures de travail, le bas salaires, l'exploitation et la misère, empêchent l'écrasante majorité des travailleurs d'user de leur droit formel de réunion, les empêchent de se grouper et de se concerter efficacement pour la défense de leurs intérêts économiques ou politiques, et où le corps de politiciens parlementaires ou antiparlementaires (dans l'appareil de l'État) peut ainsi décider par-dessus la tête des masses, du sort de ces dernières ?
Travailleurs, il y a 75 ans, en France même, les ouvriers ont donné le premier exemple d'un État réellement démocratique, émanation directe des masses travailleuses : LA COMMUNE DE PARIS.
Quelle fut l’œuvre de la Commune ?
Son premier décret supprima l'armée permanente et la remplaça par LE PEUPLE ARMÉ.
La Commune avait, EN MÊME TEMPS, le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. La police, au lieu de continuer d'être l'agent du gouvernement central, fut immédiatement dépouillée de ses attributs politiques et devint l'agent responsable et toujours révocable de la Commune. Le même principe fut appliqué à tous les autres fonctionnaires de l'administration. Depuis les membres de la Commune jusqu'en bas, la rémunération du service public ne devait être QU'UN SALAIRE NORMAL, DE TRAVAILLEUR. Les droits acquis et les droits de représentation des grandes dignitaires de l'État disparurent avec les dignitaires eux-mêmes. Comme les autres serviteurs du public, les magistrats et les juges devaient être électifs, responsables et révocables. La Commune entendait abolir la propriété de classe qui fait du travail du plus grand nombre la richesse du plus petit.
Laquelle de ces mesures démocratiques figure dans la nouvelle Constitution ? AUCUNE !
Elle laisse, au contraire intactes et consacre toutes les institutions que la Commune entendait détruire. APPROUVER LA CONSTITUTION RÉACTIONNAIRE ET CAPITALISTE QU'ON NOUS PROPOSE, C’EST BÉNIR NOS PROPRES CHAÎNES.
C'est trahir les aspirations démocratiques des prolétaires et des petites gens de France que réalisa pour la première fois la Commune.
Par le référendum du 5 mai les partis de la bourgeoisie et les renégats de la classe ouvrière veulent nous faire croire, comme au mois d'octobre, que l'enjeu de la lutte c'est la démocratie, qui sera gagnée par le "oui" ou par le « non ».
De cette manière, ils veulent laisser dans l'ombre les véritables questions qui préoccupent les masses ouvrières et paysannes, celles de l'État collecteur d'impôts et de l'administration gangrenée, celle d'un régime économique incapable de tout redressement parce que basé sur la spéculation capitaliste et la course aux armements.
Participer au référendum, par le oui ou par le non, c'est donc se battre pour l'ombre en lâchant la proie.
Le 5 mai les masses travailleuses déjoueront la manœuvre du référendum en le boycottant par un voie blanc, comme le firent un million de votants au mois d'octobre dernier, Pas d'abstentionnisme ! C'est par un bulletin blanc déposé dans l'urne que se dénombreront les travailleurs conscients, qui montreront ainsi à nos politiciens qu'on ne se moque pas impunément du peuple. Pour cela, PAS D'ABSTENTIONNISME ; VOTE BLANC !
La véritable Constitution se trouve dans un rapport de forces. La Constitution que nous avons eu de 1934 à 1937 était la même que celle de 1938 à 1940. Cependant entre ces deux époques il Y a une différence considérable, l'une ayant vu la déroute de la réaction, l'autre son triomphe. La première étant due à l'action directe des masses travailleuses, la seconde à la trahison de leurs leaders en faveur de la bourgeoisie.
C'est en renouant avec les traditions de lutte de 1934 à 1937 que les travailleurs commenceront le combat pour la véritable conquête de la démocratie. Le Premier Mai prochain, il faut rejeter la politique de trahison des leaders staliniens et "socialistes" et manifester pour les objectifs vitaux de la classe ouvrière :
À bas le salaire au rendement !
Augmentation du salaire de base.
Un salaire décent pour un travail décent,
Contre la hausse des prix, échelle mobile des salaires.
Contre le marché noir, contrôle ouvrier sur le ravitaillement.
Sans nourriture, pas de travail.
Pas de récupération de la journée revendicative du 1er Mai.
Seule cette action directe peut donner aux masses travailleuses quelque chose pour l'immédiat et elle seule ouvre la voie qui mène à la destruction de l'État totalitaire bourgeois et à la Constitution démocratique de l'État des travailleurs !
UNION COMMUNISTE
(IVème
Internationale)
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