1920

Source : num�ro 17 du Bulletin communiste (permi�re ann�e), 8 juillet 1920 sous le pseudonyme H�l�ne Blonina.


L'ouvri�re en Russie sovi�tiste

In�s Armand



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Le pouvoir sovi�tiste est le premier � cr�er les conditions dans lesquelles la femme pourra, enfin, couronner l'�uvre de sa pleine �mancipation.

Au cours des si�cles, elle fut esclave. Au d�but, sous le r�gne de la petite production, elle le fut dans la famille ; ensuite, lors du d�veloppement du capitalisme elle le devint trois fois : dans l'Etat, dans la fabrique et dans la famille.

Il en fut ainsi non seulement dans le r�gime tsariste, barbare et retardataire, mais il en est encore de m�me dans les � d�mocraties ï¿½ les plus � civilis�es ï¿½ de l'Europe occidentale et de l'Am�rique.

Sous le r�gime bourgeois, l'ouvri�re est priv�e des maigres droits politiques accord�s � l'ouvrier. A la fabrique, � l'usine, elle est encore plus opprim�e, plus exploit�e que l'ouvrier, car le patron use de son pouvoir pour l'opprimer non seulement en tant que prol�taire, mais aussi pour lui infliger toutes sortes d'outrages et de violences en tant que femme. Et nulle part et � aucun moment, la prostitution, ce ph�nom�ne le plus laid, le plus odieux de l'esclavage salari� du prol�tariat, ne s'est �panouie plus somptueusement que sous le r�gne du capitalisme.

Les ouvri�res, les paysannes, sont esclaves dans la famille, non seulement parce que sur elles p�se le pouvoir du mari, mais aussi parce que la fabrique, qui arrache les ouvri�res au foyer familial, ne les d�livre pas en m�me temps des soucis de la maternit� et de l'�conomie domestique, transformant ainsi la maternit� en une croix lourde, insupportable.

Aussi longtemps qu'exista le pouvoir bourgeois, l'ouvri�re, la paysanne ne purent s'affranchir de cette triple servitude, qui est la base sur laquelle repose le r�gime bourgeois et sans laquelle il ne peut exister.

Le pouvoir sovi�tiste, le pouvoir du prol�tariat, ouvre largement les portes devant la femme, et lui donne la possibilit� absolue de s'�manciper.

La constitution sovi�tiste a d�j� dot� les femmes de tous les droits politiques et civiques. Les ouvri�res, les paysannes, jouissent des m�mes droits de vote que l'ouvrier et le paysan. Elles peuvent au m�me titre que les hommes �lire et �tre �lues ; elles peuvent occuper l'emploi qui leur convient dans les comit�s d'usine, dans les institutions sovi�tistes, jusqu'� celui de commissaire du peuple.

La socialisation de la production, l'expropriation des capitalistes et des grands propri�taires, m�nent � un an�antissement complet de toute exploitation et de toute in�galit� �conomique.

En Russie sovi�tiste, l'ouvri�re � la fabrique, � l'usine, n'est d�j� plus une esclave salari�e, mais une ma�tresse nantie de tous les droits qui, ensemble et de pair avec l'ouvrier, par l'interm�diaire des institutions sovi�tistes et des syndicats, organise, administre, dirige toute la production et la r�partition

Il en est de m�me de la famille et du mariage. Le pouvoir sovi�tiste a d�j� r�alis� l'�galit� compl�te des droits du mari, et de la femme. Le pouvoir du mari, du p�re n'existe plus. Les formalit�s du mariage et du divorce ont �t� r�duites au minimum, � de simples d�clarations des personnes int�ress�es dans les commissariats correspondants.

Le pouvoir sovi�tiste a supprim� toute diff�rence de droits entre l'enfant � l�gitime ï¿½ et l'enfant � ill�gitime ï¿½. Ainsi a �t� supprim�e une des plus mauvaises manifestations de l'iniquit� bourgeoise. En Russie sovi�tiste, il n'y a plus � d'enfants ill�gitimes ï¿½. Pour elle tous les enfants sont dans la m�me mesure ses futurs citoyens, qui tous ont droit � ses �gards et � ses soins.

Le pouvoir sovi�tiste tend � prendre sur lui toute leur �ducation et l'instruction, d�s les premiers jours de leur naissance jusqu'� l'�ge de 16 ou 17 ans. Il aspire � prendre sur lui tout l'entretien des enfants.

Sous le r�gne du capitalisme, les enfants des prol�taires �taient, d�s leur plus tendre enfance, priv�s par la fabrique, par l'usine, des soins maternels, tandis que le gouvernement bourgeois ne faisait preuve � leur �gard d'aucun souci. De sorte que les enfants prol�tariens s'atrophiaient physiquement et moralement, languissaient, mouraient.

Le pouvoir sovi�tiste, d'ores et d�j�, en d�pit de la d�sorganisation, du blocus, des agressions ininterrompues des gardes blancs, de difficult�s inou�es, assure partiellement l'entretien public des enfants (une partie des produits se d�livre gratuitement par carte d'enfants ; des r�fectoires gratuits, des cantines scolaires sont cr��es). L'instruction est partout gratuite, � partir de l'�cole �l�mentaire jusqu'aux universit�s et �coles sup�rieures. Des cr�ches, des jardins d'enfants sont cr��s. Dans les �coles, les enfants sont fournis de chaussures et de v�tements. La pr�voyance sociale prend constamment plus d'ampleur, sous la forme de protection de la maternit�, de l'enfance, cr�ation de maisons de maternit�s, de maisons et de foyers d'enfants, de cr�ches, de jardins d'enfants.

Le travail est interdit aux enfants jusqu'� l'�ge de 16 ans. De 16 � 18 ans, ils ne travaillent que 6 heures par jour. Les m�res sont lib�r�es de tout travail huit semaines avant leurs couches et autant apr�s, et pendant tout ce temps il leur est allou� des secours qui �quivalent � leur salaire quotidien. De plus, une s�rie de d�crets ont �t� �dict�s, qui prot�gent la femme en �tat de grossesse, et en g�n�ral sur la protection du travail de la femme.

D'ores et d�j�, je le r�p�te, en d�pit de difficult�s inconnues jusqu'alors, on peut dire avec certitude qu'en Russie sovi�tiste les soins de la m�re et de l'enfant sont mieux organis�s que partout ailleurs. Et ce ne sont que les premiers pas.

De plus, au moyen de la cr�ation des r�fectoires publics, la cuisine disparait peu � peu de l'�conomie domestique.

Le pot-au-feu, tant vant� par les bourgeois, mais qui, du point de vue de l'�conomie, n'est pas du tout conforme au but, est pour les paysannes et en particulier pour les ouvri�res une peine insupportable qui leur enl�ve jusqu'au dernier loisir, les privant de la possibilit� d'aller aux r�unions, de lire, et de prendre part � la lutte de classe : le pot-au-feu, dans le r�gime bourgeois, en favorisant l'ignorance et le caract�re retardataire des ouvri�res est, de cette fa�on, un des meilleurs auxiliaires du bourgeois dans sa lutte contre l'ouvrier.

Le r�gime sovi�tiste est le r�gime de transition du capitalisme au communisme, qu'il est impossible de r�aliser sans l'�mancipation absolue de tous les exploit�s et par cons�quent de la femme. Voil� pourquoi dans le r�gime sovi�tiste se brisent et volent en �clats toutes les cha�nes qui, pendant des si�cles, avaient opprim� l'ouvri�re et la paysanne. D�s les premiers jours qui suivirent la r�volution d'octobre, les ouvri�res comprirent parfaitement que pour elles s'ouvrait une �re nouvelle de pleine �mancipation.

A leurs premi�res conf�rences (conf�rence de Moscou, en mai 1918, conf�rence de la province de Moscou, en juin 1918, et conf�rence pan-russe en novembre 1918, � laquelle assistaient plus de mille d�l�gu�s, repr�sentants de plus d'un million de prol�taires)1, les ouvri�res not�rent ce fait. Dans sa r�solution sur la question familiale, la conf�rence de la province de Moscou indique qu'avec le passage du pouvoir aux mains des Soviets, non seulement la compl�te �mancipation politique et civique des ouvri�res est devenue possible, mais aussi la suppression absolue � son esclavage de sexe et de famille, et que maintenant il appartient d'�lucider et d'�laborer les conditions de cette �mancipation. Dans les r�solutions du congr�s pan-russe, au sujet des t�ches de l'ouvri�re, entre autres il est dit :

Le pouvoir sovi�tiste, apr�s avoir donn� une �mancipation int�grale � toute la classe ouvri�re, apr�s avoir r�alis� l'�galit� en droits de l'homme et de la femme, a fait l'ouvri�re au m�me titre que l'ouvrier les ma�tres absolus de la vie, apr�s leur avoir donn� la possibilit� de l'organiser, comme cela est n�cessaire � la classe ouvri�re et � la classe pauvre de la ville et de la campagne.
Par suite de la r�volution d'octobre, par suite du passage du pouvoir aux mains des Soviets, l'affranchissement complet des ouvri�res au moyen de la suppression des vieilles formes de la famille et de l'�conomie domestique, devient non seulement possible mais est une des conditions n�cessaires de l'instauration du socialisme.

Dans cette m�me r�solution ont �t� formul�es les t�ches pos�es devant les ouvri�res en Russie sovi�tiste. Ces t�ches sont fix�es de la mani�re suivante :

La premi�re conf�rence pan-russe des ouvri�res constate une fois de plus que pour celles-ci il n'y a pas de t�ches sp�cifiquement f�minines, distinctes des t�ches communes du prol�tariat, car les conditions de leur �mancipation sont les m�mes que celles du prol�tariat tout entier, c'est-�-dire la r�volution prol�tarienne et le triomphe du communisme... au moment o� la r�volution socialiste universelle se d�veloppe, exigeant la plus grande tension de toutes les forces prol�tariennes tant pour le d�veloppement et la d�fense de la r�volution russe que pour l'organisation socialiste, chaque ouvrier, chaque ouvri�re doit devenir un soldat de la r�volution, pr�t � donner toutes ses forces pour le triomphe du prol�tariat et du communisme ; par cons�quent la t�che essentielle de l'ouvri�re est la participation la plus active dans toutes les formes et aspects de la lutte r�volutionnaire, tant sur le front qu'� l'arri�re, tant par la propagande et l'agitation que par une lutte arm�e directe... De plus... constatant que les vieilles formes de la famille et de l'�conomie domestique comme un lourd fardeau p�sent sur l'ouvri�re et l'emp�chent de devenir un combattant de la r�volution et du communisme et que ces formes ne peuvent �tre abolies que par la cr�ation de nouvelles formes d'�conomie, la conf�rence consid�re que l'ouvri�re, en prenant la part la plus active dans toutes les manifestations de la nouvelle organisation, doit porter une attention particuli�re sur la cr�ation de nouvelles formes d'alimentation, de r�partition publiques, gr�ce auxquelles la vieille servitude familiale sera abolie.

Dans les r�solutions concernant le parti communiste, il est dit que les ouvri�res sont appel�es � devenir, non seulement en paroles, mais en r�alit�, membres du parti communiste, et � entrer dans les rangs des organisations correspondantes o� l'ouvri�re et la paysanne pourront comprendre le programme du parti communiste et devenir des membres conscients de ce parti.

Dans la r�solution au sujet de la r�volution internationale, la conf�rence, en indiquant que dans les flammes de l'insurrection mondiale des ouvri�res et ouvriers se consume le vieux monde capitaliste et avec lui l'esclavage de la femme, convie les ouvri�res et les paysannes de tous les pays � se lever sous le drapeau du parti communiste pour maintenir la victoire de la r�volution universelle.

Dans cette m�me r�solution de la conf�rence pan-russe au sujet de la famille bourgeoise et capitaliste, qui pour la femme �tait une servitude... � L'�conomie collective doit remplacer l'�conomie domestique et affranchir l'ouvri�re en tant que m�nag�re. L'�ducation et l'entretien des enfants au compte du gouvernement ouvrier (dans les cr�ches, jardins d'enfants, colonies, etc.), doivent supprimer les soucis mat�riels du p�re et de la m�re... Une union libre, mais solide par les liens spirituels de camaraderie de deux citoyens �gaux de l'�tat ouvrier, tel est le nouveau mariage prol�tarien. ï¿½

Au sujet de la prostitution, la r�solution comporte ce qui suit : � ...partant de ce que les racines de la prostitution sont profond�ment ancr�es dans la soci�t� capitaliste, la premi�re conf�rence pan-russe des ouvri�res et paysannes pauvres convie � combattre la prostitution non seulement par la fermeture des maisons de tol�rance, non seulement par la punition des tenanci�res... mais par l'extirpation de toutes les survivances du r�gime capitaliste, au moyen de l'application de l'assurance de la maternit�, de la r�alisation de l'�ducation des enfants, et du remplacement de la famille bourgeoise par le mariage libre... ï¿½

Dans la r�solution de la conf�rence du gouvernement de Moscou se retrouve encore une proposition sur � l'application d'une �galisation toujours plus grande des ouvriers et ouvri�res de toutes cat�gories. ï¿½

Ainsi les ouvri�res ont parfaitement compris que leurs nouveaux droits et nouvelles libert�s n'aideront r�ellement le d�veloppement et la victoire de la r�volution que lorsque, non seulement une petite avant-garde, mais les masses d'ouvri�res elles-m�mes seront entra�n�es � prendre une part active � la vie du parti et des Soviets, et que par cons�quent, devant les ouvri�res d'avant-garde se pose pr�cis�ment la t�che d'entra�ner cette masse dans la lutte r�volutionnaire pour le communisme.

Ce n'est pas une t�che des plus faciles. Il appartient d'int�resser � la lutte r�volutionnaire, � l'�uvre d'organisation, d'administration, les �l�ments les plus retardataires, les plus ignorants des masses ouvri�res ; il faut conqu�rir le bas peuple qui jusqu'alors dans tous les pays n'offrait qu'un terrain peu propice � l'agitation et � la propagande, et qu'aucun parti n'a encore r�ussi � gagner.

Sous le r�gne du capitalisme, les ouvri�res et paysannes sont absolument �cart�es de toute vie publique et politique, tant par les conditions de la vie de famille bourgeoise que par leur absence de droits politiques. Gr�ce � cela, lors du passage du pouvoir aux mains des Soviets, lorsque devant la classe ouvri�re s'est dress�e l'�uvre d'administration et l'�uvre complexe et difficile de la nouvelle organisation, les ouvri�res, dans leur ensemble, se sont montr�es encore plus inexp�riment�es que les ouvriers. Pour attirer avec succ�s les ouvri�res � la cause commune, il �tait n�cessaire en premier lieu de les aider � apprendre comment travailler ; de leur faire comprendre o� et comment elles pourraient employer leurs forces.

Il �tait n�cessaire d'�laborer de nouvelles m�thodes de propagande, de nouvelles fa�ons d'aborder les ouvri�res et les paysannes adapt�es � leurs particularit�s psychologiques et aux nouvelles t�ches qui les attendent. Ici la propagande par l'action acquiert une signification particuli�re, c'est-�-dire la propagande qui am�nerait directement les ouvri�res et les paysannes � prendre part � telle ou telle organisation sovi�tiste ou autre travail.

Des assembl�es de d�l�gu�es d'ouvri�res ont �t� organis�es, qui ont rendu dans ce sens les plus grands services. Ces assembl�es de d�l�gu�es sont form�es de repr�sentantes de toutes les fabriques et usines d'un rayon donn�, �lues dans les r�unions g�n�rales des diff�rentes entreprises. Les assembl�es de d�l�gu�es sont des institutions gr�ce auxquelles les ouvri�res apprennent en pratique comment doit �tre men�e l'action sovi�tiste, comment employer leurs forces et leur �nergie r�volutionnaire dans la lutte commune du prol�tariat et � l'organisation. D'autre part, ces assembl�es sont une magnifique liaison entre les institutions sovi�tistes et les masses d'ouvri�res.

Les d�l�gu�s se d�composent en groupes de personnes travaillant dans telle ou telle section sovi�tiste (jusqu'� pr�sent surtout dans l'assurance sociale du travail, dans l'instruction publique, dans la pr�servation de la sant�) et l�, m�nent une action pour l'inspection et le contr�le des asiles, des refuges, des jardins d'enfants, des �coles d'�criture et de lecture et autres, ainsi que pour leur cr�ation ; pour le contr�le et l'inspection des r�fectoires et des cuisines et pour la suppression des abus et des d�sordres ; pour l'observation dans les �coles de la r�partition r�guli�re des chaussures, des v�tements ; pour le recueillement de renseignements � l'usage des inspecteurs du travail ; pour le contr�le d'une application parfaite des r�glements sur la protection du travail de la femme et de l'enfant. Organisation des ambulances et h�pitaux et soins et visites aux bless�s et malades. Inspection et contr�le des casernes, participation � la milice. Action pour la juste distribution de la ration des gardes rouges, pour amener les ouvri�res � prendre une part plus active dans toutes les formes de direction et d'administration de la production, etc.

Les sections, de leur c�t�, mettent les ouvri�res au courant de leurs travaux, les font entrer aux �coles et aux cours qu'elles ont ouverts pour telle ou telle branche du travail sovi�tiste (cours de pr�voyance sociale, d'instruction pr�-scolaire, cours d'infirmi�res rouges, de brancardi�res, etc.).

De plus les d�l�gu�es, continuant leur action dans leur usine ou fabrique, font des rapports p�riodiques � leurs �lecteurs sur leur activit� et sur celle des sections dans lesquelles elles travaillent, organisent dans les usines un tour de service pour �couter les revendications, les plaintes et conna�tre les besoins des ouvri�res.

Les d�l�gu�s prennent une part active dans toutes les campagnes entreprises par le parti, par les soviets (chauffage, rentr�e des r�coltes, approvisionnement, secours aux bless�s, lutte contre les �pid�mies, trains d'agitation dans les provinces, etc., etc.). Les assembl�es de d�l�gu�es se r�unissent deux ou quatre fois par mois. Dans ces derniers temps, � Moscou et dans quelques autres localit�s, la norme de la repr�sentation a �t� abaiss�e ; les d�l�gu�es sont �lues � raison de une sur vingt ouvri�res. De la sorte, par l'interm�diaire des assembl�es de d�l�gu�es, on r�ussit � gagner les grandes masses d'ouvri�res qui deviennent de plus en plus des r�serves dans lesquelles le parti et les soviets peuvent puiser des forces nouvelles. Les � semaines du parti ï¿½ l'ont prouv� abondamment. A Moscou, par exemple, o� pendant la semaine du parti se sont inscrits dans celui-ci pr�s de 15 000 nouveaux membres, et dans ce nombre quelques milliers d'ouvri�res, un grand pourcentage fut donn� pr�cis�ment par les assembl�es de d�l�gu�es.

Les conf�rences d'ouvri�res sans parti ont une grande importance de propagande ; elles se r�unissent dans les diff�rentes villes, gouvernements, districts, environ tous les trois ou quatre mois (dans toute la Russie une seule conf�rence a �t� convoqu�e l'an pass�). Ces conf�rences se sont r�v�l�es comme un excellent moyen pour agiter et r�veiller les masses demeur�es �trang�res au mouvement et, dans ce domaine, ont donn� de bons r�sultats (en ce moment, les paysannes sont int�ress�es � ces conf�rences). En octobre dernier, par exemple, � Moscou, s'est tenue une conf�rence de sans-parti � laquelle assistaient plus de 3 000 d�l�gu�es, repr�sentant de 60 000 ouvri�res moscovites (on compte � Moscou, environ 180 000 ouvri�res).

La propagande et l'agitation sont aussi men�es par la parole et par la presse. Presque dans chaque organe du parti para�t la � page de l'ouvri�re ï¿½.

Nous pouvons dire sans aucune exag�ration (quels que soient les d�fauts et les lacunes de notre action) que les r�sultats obtenus pour cette ann�e ont d�pass� notre attente. Il y a un an, il n'existait qu'un tout petit groupe d'ouvri�res conscientes ; l'�tat d'esprit du reste de la masse ouvri�re �tait r�volutionnaire, mais encore instinctif, inconscient, inorganis�.

Actuellement, il s'est form� des cadres suffisamment nombreux d'ouvri�res conscientes � membres du parti communiste � qui au cours de cette ann�e ont r�ussi � accomplir tel ou tel travail sovi�tiste ou de parti.

De talentueuses ouvri�res propagandistes ont �t� form�es, et en ce moment des ouvri�res publicistes sont en voie d'�ducation.

Le mouvement des ouvri�res a d�j� gagn� les grandes masses et devient une force politique consid�rable. C'est � Petrograd, � Moscou, dans les gouvernements de Moscou et d'Ivano-Voznecensk que le travail a le mieux march�. Mais, il n'y a pas de doute que c'est � Petrograd que les ouvri�res sont les mieux organis�es et les plus conscientes. Dans les autres gouvernements une action est entam�e qui dans certaines localit�s marche suffisamment bien. A la conf�rence pan-russe des organisations du parti pour le travail parmi les femmes, se trouvaient les repr�sentants de 28 gouvernements ; ceux de l'Oural, d'Oufa, d'Orenbourg, d'Astrakhan, n'avaient pu arriver, quoique l� bas une action soit aussi men�e. Ainsi le mouvement des ouvri�res embrasse toute la Russie.

Les ouvri�res firent preuve de magnifiques capacit�s d'organisation et de travail. Elles ont d�j� r�ussi, en d�pit de difficult�s inconnues � pr�ter main forte aux sections sovi�tistes, � cr�er un nombre important de cr�ches, de jardins d'enfants, d'�coles, de r�fectoires publics, etc. Et au fur et � mesure que l'ouvrier est oblig� d'aller au front, dans l'arm�e rouge, pour d�fendre le pouvoir sovi�tiste contre les agressions de Denikine, de Youdenitch, des imp�rialistes de l'Entente, l'ouvri�re le remplace non seulement � la fabrique et � l'usine, mais dans les soviets, dans les syndicats, dans la milice, etc. Et nombreuses furent les ouvri�res qui voulurent sur le front se battre c�te � c�te avec l'ouvrier contre les gardes blancs.

Au cours de cette ann�e les ouvri�res se sont d�finitivement persuad�es que pour avoir la possibilit� d'organiser tranquillement une vie nouvelle, pour mettre un terme � la crise du transport et alimentaire, il est n�cessaire d'en finir avant tout avec la force arm�e des Youdenitch et des Denikine ; il est n�cessaire de porter un coup d�finitif aux forces de la bourgeoisie et de mettre fin aux tentatives d'�trangler le pouvoir sovi�tiste. C'est pour ces raisons que les ouvri�res, au cours de ces deux derniers mois, ont port� la plus grande partie de leur attention sur le plus large soutien de l'arm�e rouge.

Maintenant que nous infligeons � Denikine un coup d�cisif, elle pourra � nouveau, naturellement sans oublier, ne serait-ce qu'un instant, son action dans l'arm�e rouge, donner plus de forces aux autres t�ches.

A la face de l'ennemi imp�rialiste, la prol�taire russe s'est montr�e vraiment digne de son camarade prol�taire. Elle n'a pas cess� de s'affirmer toujours pr�te � consentir toutes sortes de sacrifices, afin d'en finir avec les forces de la bourgeoisie. Elle disait aux ouvriers : � Certainement que cela nous est difficile, p�nible, mais partez au front, ne pensez pas � nous, nous vous remplacerons, nous en viendrons � bout ï¿½. Pendant la derni�re offensive de Denikine les ouvri�res de Toula d�clar�rent, dans une r�solution prise � l'unanimit�, que Denik�ne n'entrerait � Toula qu'en passant sur leur corps. De telles d�clarations furent faites en maintes autres villes

Contre Denikine, Youdenitch, s'est dress�e toute la Russie ouvri�re, pr�te � tous les efforts et aux pires tourments rien que pour sauvegarder le pouvoir sovi�tiste.

Le pouvoir sovi�tiste fait p�n�trer ses racines jusqu'au plus profond de la classe ouvri�re. Pour sa d�fense, il a su soulever les �l�ments les plus retardataires et les plus obscurs. Et c'est l� qu'est la meilleure garantie de sa solidit� et de son invincibilit�.

Les femmes bourgeoises ha�ssent le pouvoir sovi�tiste et s'efforcent, autant que faire se peut, de le ternir aux yeux des masses, ne s'arr�tant pour cela devant aucun mensonge, m�me le plus invraisemblable et le plus ridicule.

En automne dernier, les repr�sentants des cercles imp�rialistes fran�ais et anglais mettaient en circulation cette calomnie odieuse et stupide que soi-disant le pouvoir sovi�tiste � avait socialis� ï¿½, ou � nationalis� ï¿½ les femmes.

A cette occasion, les mondaines et les demi-mondaines de Paris et de Londres avaient cru n�cessaire de s'adresser solennellement au tigre imp�rialiste Clemenceau, avec cette pri�re de d�fendre les femmes russes contre la bestialit� du pouvoir sovi�tiste.

Une pareille accusation port�e contre les communistes n'est pas une nouveaut�. Marx, d�j� dans le � Manifeste communiste ï¿½, en des termes imp�rissables, fl�trissait et ridiculisait cette invention bourgoise.

Et c'est une v�ritable honte que le repr�sentant de la deuxi�me Internationale Kautsky eut l'impudence de soutenir et de r�p�ter cette ignoble calomnie contre le pouvoir sovi�tiste.

Toutes ces tentatives de d�tacher les ouvri�res, de les insurger contre la r�volution, ne conduiront assur�ment � rien. Parmi les ouvri�res des autres pays, la constitution, les d�crets du pouvoir sovi�tiste, toute son activit�, de m�me que les r�solutions et les d�clarations des ouvri�res russes elles-m�mes sont la meilleure et la plus irr�futable des r�ponses. Ces messieurs de la deuxi�me Internationale ne gagnent en l'occurrence que la haine et le m�pris des ouvri�res de tous les pays. Chaque ouvri�re de Russie r�pondra � ces messieurs � peu pr�s ceci : Sous le r�gne du capitalisme, nous �tions esclaves, on trafiquait de nous dans le mariage et en dehors de celui-ci. Sous le r�gne du pouvoir sovi�tiste, nous avons r�ussi les premi�res � nous d�barrasser de notre fardeau � nous sentir des �tres libres. Ce qui nous parut n'�tre qu'un r�ve lointain, un conte magnifique et que nous craignions de croire, devient maintenant possible, palpable, r�alisable, et d'ores et d�j� nous commen�ons � instaurer le communisme.

Il est ridicule de nous rappeler en arri�re !... Quels que soient les efforts des dames de la bourgeoisie et de leurs auxiliaires de la deuxi�me Internationale, ils ne r�ussiront pas � faire d�vier l'ouvri�re de sa route.

Car elle a d�j� fait son choix. Elle va avec le pouvoir sovi�tiste, avec la troisi�me Internationale, contre vous, messieurs !

H�l�ne BLONINA.

Note

1 Voir l'intervention d'Alexandra Kollonta� � ce congr�s.


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