1948 |
Manifeste du II° congrès de la IV° Internationale aux exploités du monde entier |
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La IV° Internationale ne se pose pas pour tâche le rafistolage du régime capitaliste ou la recherche de succédanés aux solutions révolutionnaires "trop radicales". Son programme c'est celui de la mobilisation des masses pour le renversement du capitalisme. C'est pourquoi les revendications transitoires ne comportent nulle trace d'esprit conformiste ou évolutionniste. Surmontant la vieille antithèse entre le programme minimum et le programme maximum, elles relient au contraire chacune des préoccupations quotidiennes au problème le plus brillant de notre époque, la conquête révolutionnaire du pouvoir. Sectaire est toute propagande qui se borne à répéter comme une formule rituelle ce but général du mouvement sans fournir à la classe ouvrière le moyen d'en acquérir la compréhension à travers sa propre expérience. Opportuniste est toute activité qui introduit, fut‑ce subrepticement une conception de lutte par étapes, se limitant "momentanément" aux revendications immédiates, transformant les mots d'ordre transitoires en objectifs en soi et considérant les travailleurs comme trop arriérés pour se voir expliquer d'emblée le programme de la révolution communiste.
En face de l'épouvantable prostitution du communisme par la bureaucratie stalinienne et des innombrables déformations et falsifications qui s’ensuivirent, il est aujourd'hui nécessaire de réaffirmer les caractéristiques fondamentales de la révolution communiste. Elle signifie l'expropriation de la bourgeoisie et sa destruction en tant que classe, elle signifie la reprise des moyens de production et d'échange par le prolétariat. Elle signifie la destruction de la machine bureaucratique de l'Etat bourgeois et son remplacement par le prolétariat organisé en classe dominante dans des conseils ouvriers où existe la démocratie prolétarienne. La collectivisafion des moyens de production et d'échange, la concentration de tous les établissements de crédit en une seule banque d'Etat, propriété collective ; la constitution du monopole du commerce extérieur ; l'établissement d'une économie planifiée ne sont pas des buts en soi de la révolution, ce sont seulement des moyens d'élever progressivement le niveau de vie et de culture des masses, de diminuer la longueur de journée de travail jusqu'au point où l'immense majorité des travailleurs sera capable d'administrer l'économie et les affaires publiques, où la division de la société en classes s'effacera et où l'Etat mourra. C'est pourquoi l'établissement et le développement du contrôle ouvrier sur la production, la participation active des masses l'élaboration, à l'exécution et à la vérification des plans de production, l'intervention de plus en plus déterminante du facteur humain à tous les échelons de la vie économique, la soumission de plus en plus grande des normes de production aux besoins de la consommation sont des éléments indispensables de l'économie après le renversement du capitalisme et constituent autant d'indices de la progression réelle de la société vers le socialisme. C'est pourquoi la réduction radicale du corps des fonctionnaires professionnels, la fusion des fonctions législatives et exécutives et leur exercice à tour de rôle par un nombre croissant d'ouvriers éduqués sont les indices les plus nets de la liquidation définitive de la contre‑révolution, de la stabilisation de la nouvelle société et de la diminution radicale de ses contradictions internes.
Le programme de la révolution communiste, c'est celui de l'émancipation de toutes les nationalités, l'octroi effectif à tous les peuples du droit d'autodétermination, y compris du droit de sécession. Eliminant toute exploitation et toute oppression d'un peuple, par un autre en éliminant conjointement les exploiteurs de chaque nation ; donnant à chaque nationalité la possibilité de développer librement sa propre individualité culturelle, la révolution détruira en même temps les sources du chauvinisme, pourchassera les mystiques nationalistes et racistes jusque dans leurs ultimes refuges et. extirpera tout ce qui pourrait empêcher la réalisation d'une véritable fédération universelle des peuples du monde entier.
La révolution communiste ne libérera pas seulement l'immense énergie productive des masses sur le plan de l'économie. Elle pénétrera dans toutes les sphères de la société et libérera partout un potentiel créateur considérable. L'éducation, la qualification scientifique et technique, le mouvement artistique et littéraire, l'organisation de la santé publique, la construction de villes et le façonnement des mœurs seront pour la première fois ouverts aux millions de prolétaires et de coolies dont l'esclavage économique estropie systématiquement les innombrables talents. De ce fait, toutes ces activités connaîtront à leur tour une transformation radicale et continuelle de leur nature. Devenue enfin maîtresse de son sort, l'humanité fera pénétrer la conscience critique dans les dernières pénombres de l'inconnu et sa propre nature deviendra l'ultime objet de la révolution permanente. Du règne de la nécessité, l'homme pénétrera dans celui de la liberté.
Dans une société qui risque de sombrer dans la barbarie, mais qui est encore grosse de toutes ces possibilités grandioses, la IV° Internationale ne considère comme réaliste que le programme qui se fixe fermement le but du communisme. Consacrer aujourd'hui sa vie à la cause de l'émancipation révolutionnaire de l'humanité est la seule façon de conserver la dignité humaine au milieu du cauchemar d'un monde agonisant. Se lamenter sur la décadence de la civilisation sans présenter aux peuples l'issue vers un avenir meilleur, c'est devenir soi‑même un facteur de décomposition sociale.
Seul le programme de la révolution communiste mérite aujourd'hui des sacrifices pour sa réalisation. Seul, ce programme donne à la IV° Internationale le droit d'appeler aujourd'hui les travailleurs avancés de tous, les pays à se grouper sous son drapeau.
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